Samedi 19 janvier 2019 : Ainos/Enez

Notre société reprend ses activités le samedi 19 janvier 2019 avec l’assemblée générale à 15h, suivie de la conférence de

Sait BAŞARAN (Directeur de la fouille d’Ainos/Enez, Ministère turc de la Culture), Helmut BRÜCKNER (Professeur à l’Université de Cologne) et Anca DAN (Chargée de recherches, AOROC, CNRS-ENS-PSL) sur Nouvelles recherches historiques et géoarchéologiques à Ainos/Enez (Turquie d’Europe).

Ainos/Enez (Turquie d’Europe)

Le site archéologique d’Ainos (moderne Enez, province d’Edirne), à l’embouchure du fleuve Hébros (moderne Evros/Maritza/Meriç), sur le rivage turc faisant face à la Grèce (Alexandroupolis et l’île de Samothrace) a été occupé continuellement, depuis la préhistoire. De fait, un établissement néolithique (6500 av. J.-C.) a été découvert à Hoca Çeşme (ca. 10 km E de la ville actuelle, à l’intérieur des terres). Mais à Ainos même, les plus anciennes traces archéologiques remontent au Chalcolithique (IVe millénaire av. J.-C.): elles furent trouvées sur la colline principale d’Enez – qui a accueilli l’“acropole” antique d’Ainos et où l’on voit encore aujourd’hui les fortifications médiévales et l’ancienne église Saint Constantin, devenue la mosquée Fatih en 1456.

La fondation de la ville grecque en pays thrace (des Apsinthes), au VIIe siècle av. J.-C., par des Éoliens venus peut-être de l’Asie Mineure, de la Chersonèse et de l’île de Lesbos, a déterminé le destin égéen de la péninsule d’Ainos, véritable tête de pont entre la mer et l’arrière-pays. Le fleuve, navigable par de gros bateaux jusqu’à Adrianopole/Edirne encore au XVIIIe siècle, fut une voie d’accès privilégiée depuis la Méditerranée vers les Balkans et la mer Noire. Athéniens, Perses, Macédoniens, Romains, Byzantins, Génois et Ottomans ont tiré profit de cette position stratégique, tout en exploitant les ressources des eaux (poisson, sel) et des terres (esclaves, cultures de céréales, vigne). Mais ils ont dû faire face à des changements environmentaux complexes, que le travail interdisciplinaire des historiens, archéologues et géoarchéologues permet aujourd’hui de reconstituer en partie.

Nous présenterons un bilan des recherches en cours, en partant des sources littéraires (Anca Dan) et des plus importantes découvertes archéologiques, pour la plupart inédites (Sait Başaran), mises désormais dans une nouvelle perspective géographique (Helmut Brückner, Anna Pint). Sur la base des carottages géomorphologiques et des prospections géophysiques (électriques et magnétiques, réalisées par l’Université de Kiel sous la direction du Prof. W. Rabbel), nous proposons un premier scénario de l’évolution de la côte marine, des lagunes et du delta de l’Hébros/Meriç, avec les zones qui ont pu accueillir des ports et des mouillages maritimes et fluviaux tout au lont de l’histoire. Au final, nous retournerons aux objets et aux textes, pour montrer comment la force de la nature trouve un reflet dans les pratiques cultuelles des hommes, au-delà des cultures.

Des matériaux d’information complémentaires, en anglais et allemand, sont disponibles à l’adresse http://www.transfers.ens.fr/IMG/pdf/abstracts-istanbul.pdf. Cette recherche s’intègre au programme de fouilles menées par l’Université d’Istanbul et le Ministère turc de la Culture, depuis 1971 ; elle est actuellement financée par le programme LEGECARTAS du CNRS http://www.archeo.ens.fr/spip.php?article1685; la collaboration franco-turco-allemande se situe dans la continuité du programme allemand SPP Häfen (dir. Helmut Brückner, Thomas Schmidts): http://www.spp-haefen.de/en/projects/die-thrakische-hafenstadt-ainos.